L’homme : Est-ce possible d’être heureux et d’avoir accès au bonheur perpétuel ?
Le pêcheur : Qu’entendez-vous
par bonheur perpétuel ?
L’homme : J’entends un état
de bien-être qui dure dans le temps, sans être constamment tourmenté par nos
soucis. Avoir suffisamment d’argent et de nourriture pour ne pas vivre dans le
manque de toutes sortes de choses. Ne pas toujours vivre dans l’angoisse de ce
que sera demain, d’être malade ou de souffrir.
Le pêcheur : Bien sûr.
Toutefois pour se faire, encore faut-il identifier ce qui nous amène à rester
accroché à ce qui nous tourmente, aux sentiments de manque que nous maintenons
en nous et les pensées et énergies d’angoisse que nous laissons se maintenir
dans notre tête.
L’homme : Vous voulez-dire
que ce ne sont que des perceptions psychologiques qui nous empêchent d’être
heureux ? Pourtant le manque d’argent ou les possibilités de devoir faire face à
des malheurs sont pourtant bien réels et ne sont pas que des inventions dans
notre tête il me semble !
Le pêcheur : Oui
effectivement. Toutes ces choses peuvent être bien réelles ou se produire dans
un futur plus ou moins proche. Nous pouvons effectivement devoir y faire face.
Les événements de la vie sont ce qu’ils sont. Ils se présentent à nous et nous
affectent de façons variables selon la façon que nous les percevons. Face à un
manque d’argent par exemple, certaines personnes vont se mettre en action pour
trouver un travail ou réaliser des tâches leur permettant de faire un peu
d’argent pour combler leurs besoins. D’autres vont être plutôt paralysées ou
découragées par la situation et vont se mettre en mode attente de se faire
prendre en charge. Face à la maladie, il en va de même. Certaines vont se laisser
envahir en se disant qu’elles sont à la merci de cette affliction, alors que
d’autres vont rechercher des moyens de pouvoir se guérir.
L’homme : Quoi penser alors des personnes qui n’ont
aucune ressource pour combler ne serait-ce que leurs besoins primaires ?
Le pêcheur : Il est vrai que
plusieurs ont que très peu de marge de manœuvre ou même pas du tout pour
combler leurs besoins. Je me désole de ce que les êtres humains ont à endurer
face à toutes les difficultés auxquelles ils doivent faire face. Je ne peux pas
témoigner de la possibilité d’avoir accès au bonheur perpétuel dans ces
situations pour ne les avoir pas vécus moi-même.
J’ai certes constaté le sourire
d’enfants ou de personne très âgées d’une pureté indescriptible même vivant dans des
situations d’extrêmes pauvreté. J’ai côtoyé aussi des personnes avec des
handicaps ou des maladies graves témoigner de la beauté et de la grandeur de la
vie. La sérénité, la luminosité et l’ampleur du vivant qui se dégageaient en
leur présence avaient même un effet d’apaisement et de plénitude. Même dans ces
conditions, j’ai pu ressentir la joie de vivre et l’intensité de la présence se
manifester. Mais j’insiste à dire que ce ne sont que quelques exemples que j’ai
rencontrés et ne reflète peut-être pas la réalité de tous et de toutes et des
différentes situations qu'ils ou qu'elles ont à vivre. Ce qui ressort toutefois ici, c’est
que même si une personne vit une situation difficile, elle peut toujours avoir
accès à sa source de joie intérieure.
L’homme : Vous avez parlé de
rester accroché à ce qui nous tourmente et à nos sentiments d’angoisse qui
nous empêchent d’être heureux. Pouvez-vous me préciser votre pointe vue ?
Le pêcheur : La notion de
bonheur est souvent confondue avec la réalité qui se présente dans notre vie.
Nous ne voudrions pas devoir vivre des situations qui s’opposent à ce qu’on
s’attend de la vie. Nous ne voulons pas souffrir, être pauvre, être malade,
vieillir, perdre ce que l’on a. Ou à l’inverse, nous voulons acquérir des
biens, faire des voyages, avoir de l’argent en quantité suffisante et même plus,
être en bonne santé, etc. Si ces éléments sont absents de notre vie, nous
associons ces réalités à l’absence de bonheur ou au malheur.
L’idée de bonheur est aussi
associée la plupart du temps à ce que collectivement les autres définissent.
Que ce soit les médias, les publicités ou les commerçants, plusieurs forces
gravitent autour de la personne pour définir ce qu’elle doit avoir comme bien
ou comme condition de vie pour se permettre d’avoir droit à ce qui est définit comme
étant le bonheur.
Plusieurs de nos tourments
intérieurs sont associés à cette crainte de ne pas avoir accès à ce qu’on
s’attend du bonheur. Même quand nous avons tout ce qui correspond au bonheur,
nous commençons à être malheureux, juste à l’idée qu’il est possible de perdre
ces mêmes conditions du bonheur. À la place du bonheur réel émergent
l’anxiété d’avoir plus ou l’angoisse de perdre ce que nous avons. Nous vivons
ainsi notre vie dans une tension justement rattachée à ce que nous désirons
obtenir, conserver et nous tendons par tous les moyens à nous accrocher au bonheur.
L’homme : Le bonheur
serait-il alors une limitation, un piège qui nous enferme dans les mécanismes
que vous venez de décrire ?
Le pêcheur : Il peut l’être
en effet si nous le voyons comme je viens de le décrire. La vie est toujours en mouvement et tout peut
se produire d’un instant à l’autre. Tout peut basculer d’une situation de
confort à une autre totalement différente où la perte d’emploi, la faillite, la
maladie, la perte de personnes importante ou tout autre événement ne peut plus
cadrer dans cette idée de bonheur. Est-ce que la vie a pour autant diminuée en
valeur ? Est-ce que ce nouveau contexte signifie que vous êtes dans le malheur
et qu’il faille retourner le plus vite possible à l’état de bonheur, sinon
votre vie n’a plus de sens ?
L’homme : Non, j’imagine que
c’est seulement une autre réalité à laquelle nous devons faire face.
Le pêcheur : C’est très
juste. Ce n’est pas parce que nous devons faire face à de nouvelles situations
que nous devons pour autant déclarer forfait sur une quelconque notion de
bonheur non comblé.
L’homme : Alors ma question
de départ n’a plus vraiment sa raison d’être face à votre argumentation à
savoir si nous pouvons vivre dans un état de bonheur perpétuel. Alors que c’est
la notion même de bonheur qui fait problème.
Le pêcheur : La notion de
bonheur peut toujours être utilisée, mais pas comme nous l’entendons
généralement. Le bonheur ne peut pas être juste relié à des situations qui se
manifestent dans notre vie ou à des possessions ou des objectifs qui doivent
être remplis.
Lorsque je vous ai répondu à votre question par l’affirmative, c’est que j’ai associé à la notion de bonheur, l'importance d'y joindre la joie intérieure. Le bien-être intérieur et permanent que plusieurs recherchent dans leur quête du bonheur, c’est dans l’état de joie qu’ils peuvent le retrouver dans sa forme la plus intense et la plus durable.
Lorsque je vous ai répondu à votre question par l’affirmative, c’est que j’ai associé à la notion de bonheur, l'importance d'y joindre la joie intérieure. Le bien-être intérieur et permanent que plusieurs recherchent dans leur quête du bonheur, c’est dans l’état de joie qu’ils peuvent le retrouver dans sa forme la plus intense et la plus durable.
L’homme : Qu’est-ce que la
joie alors ?
Le pêcheur : À la différence
du bonheur que l'on tente de définir avec des descriptions de ce qu’il doit
contenir, la joie intérieure est plutôt de l’ordre du ressenti. La joie est un
état de satisfaction, de plénitude et d’enthousiasme face à la vie, quel que
soit ce qui s’y présente. Cet état de joie est un contact direct avec la satisfaction de sentir la vie qui coule en nous et d'être pleinement en vibration avec l'énergie de vie. Cette présence au vivant créé un ressenti profond de joie et de plénitude dans une grande sérénité et un bien-être profond et durable. Il n'est pas question ici de joies spontanées plus ou moins intense, mais de joie permanente. Ces états de joie spontanée sont des échantillons ou des indices qui peuvent nous indiquer la possibilité de pouvoir toucher quelque chose de plus profond en nous, cet état de joie intérieur permanent créant le véritable bonheur.
Les faits de la vie ou les situations ne sont plus ce qui définissent le bonheur ou le bien-être intérieur. C’est l’attitude ou le positionnement de la personne dans son état de joie naturelle qui ouvre sur la possibilité de cet état de bien-être. Cet état peut devenir permanent dans la mesure où la personne mobilise cette attitude dans son quotidien. La joie intérieure qui créé cet état de bonheur est très nourrissante. Elle vivifie et fournit l’énergie nécessaire pour affronter les situations de la vie. Elle permet de sourire et de demeurer ouvert à tout ce qui se présente.
Les faits de la vie ou les situations ne sont plus ce qui définissent le bonheur ou le bien-être intérieur. C’est l’attitude ou le positionnement de la personne dans son état de joie naturelle qui ouvre sur la possibilité de cet état de bien-être. Cet état peut devenir permanent dans la mesure où la personne mobilise cette attitude dans son quotidien. La joie intérieure qui créé cet état de bonheur est très nourrissante. Elle vivifie et fournit l’énergie nécessaire pour affronter les situations de la vie. Elle permet de sourire et de demeurer ouvert à tout ce qui se présente.
L’homme : Ce ne sont donc plus les
faits qui définissent alors le bonheur des personnes ?
Le pêcheur : Exactement. La
compréhension et l’acceptation que tout peut arriver dans notre vie ne limite
plus à définir ce qui représente un état de bonheur ou de malheur. Les événements
nécessitent tout de même que nous agissions pour leur faire face, quelles que
soit les difficultés qu’ils exigent. Ils deviennent des défis et des
expériences de la vie mais ne définissent plus notre état de bien-être
intérieur, de joie et de bonheur. Ils sont des réalités de la vie qui se
présentent à nous.